Des contenus violents qui circulent sur les réseaux

Les vidéos montrant des agressions ou des décès sont largement diffusées sur différentes plateformes et suscitent un fort écho. Ces séquences, relayées sur X, Telegram, Kick et YouTube, sont visionnées par des millions de personnes, commentées et parfois relayées sans filtre.

Leur audience réunit à la fois des curieux et des spectateurs attirés par une forme de trash, recherchant une proximité avec des faits réels sans mise en contexte.

Une curiosité morbide et une addiction potentielle

Des mécanismes cérébraux et émotionnels

La curiosité pour le choc est décrite comme une pulsion universelle permettant d’exprimer, par procuration, des mouvements agressifs. À l’ère numérique, ce réflexe peut devenir une stimulation continue et certains professionnels parlent d’une addiction au choc.

Les neurosciences indiquent que l’exposition à des images violentes stimule des zones du cerveau liées à la gestion des émotions et du stress. En revanche, une exposition excessive peut atténuer cette réponse, ce qui peut traduire une désensibilisation au danger et au mal vécu chez autrui, selon des chercheurs de l’UNIGE. Le spectateur ressent alors moins d’émotion face à la douleur d’autrui, tout en ressentant parfois plus d’angoisse, d’irritabilité et d’isolement.

Approches et dérives

Certains internautes pourraient aussi chercher, sans s’en rendre compte, à affronter des traumatismes niés, en tentant de revivre une expérience et de la transformer.

Du voyeurisme à la participation active

Sur Kick ou Telegram, la violence n’est plus seulement observée : elle peut devenir une expérience participative. L’affaire d’un streamer français, Jean Pormanove, mort en direct le 18 août 2025 après plusieurs jours de sévices devant un public enthousiaste, illustre cette dérive. Ce drame met en lumière une dynamique communautaire en quête d’émotions extrêmes et d’un spectacle interactif de la souffrance.

Des sociologues décrivent cette évolution comme une nouvelle forme de catharsis collective, où la violence devient une performance sociale et un exutoire pour des frustrations qui ne trouvent pas d’expression dans le quotidien.

Des conséquences invisibles et des pistes d’accompagnement

Plusieurs études, notamment menées par l’Université de Boston et le Journal of Medical Internet Research, montrent que l’exposition prolongée à des images ultraviolentes peut accroître les risques d’insomnie, de dépression et de stress post-traumatique, en particulier chez les plus jeunes.

Angélique Gozlan, docteure en psychopathologie, souligne que l’origine du choc réside aussi dans la décontextualisation des images et rappelle l’importance de ne pas laisser les enfants seuls face à des contenus non contextualisés.

Pour aider les jeunes, Pascal Roman évoque la nécessité d’un soutien parental et d’un accompagnement thérapeutique qui apportera des réponses et aidera à ne pas s’enfermer dans ce type de pratique.

Penser et regarder autrement dans une société saturée d’images

La fascination pour la mort ou la violence n’est pas une pathologie en soi. Comprendre ce besoin de choc permet aussi d’appréhender une époque où l’image prend une place prépondérante. Le défi pourrait résider moins dans la censure que dans une éducation au regard, capable d’offrir des repères face à ces contenus rapidement accessibles.

By