Dans le Caveau des Vignerons à Lutry, une discussion intergénérationnelle met en lumière les mutations de l’engagement amoureux.

Jasmine et Samuel forment un jeune couple avec une fille de deux ans et illustrent une génération qui réinvente les codes du mariage.

Une approche contemporaine du contrat amoureux

« Moi je lui avais dit direct: tu sauras, ce n’est pas moi, ce n’est pas un truc qui m’intéresse », raconte Jasmine à propos du mariage traditionnel. Issue d’une famille féministe, elle ne se reconnaissait pas dans « la robe blanche » et « une forme de soumission de la femme par rapport à son mari ».

Pourtant, le couple a choisi de s’unir, mais selon leur vision: partenariat enregistré cantonal et « contrat de famille », terme qu’ils privilégient à « contrat de concubinage » qui les dérange.

Un contrat écrit collectivement

Pendant six mois, Jasmine et Samuel ont régulièrement effectué des marches en forêt afin de construire leur projet commun. « On avait fait un cahier des charges avec une liste de thèmes qu’on voulait aborder », explique Jasmine. Finances, enfants, lieu de vie… tout y passe.

Plus surprenant encore: ils ont même esquissé leur « contrat de divorce ». « On est de l’avis que c’est mieux de discuter de ces choses tant qu’on s’aime et qu’on s’entend bien », justifie Jasmine. Parmi leurs engagements: en cas de séparation, rester dans la même ville jusqu’aux 16 ans de leur plus jeune enfant.

Des expériences qui questionnent l’amour après 50 ans

À 81 ans, Françoise bouscule les préjugés. Après deux mariages et plusieurs relations, elle vit une belle histoire d’amour. C’est un autre homme, rencontré à 55 ans, qui a été l’élément déclencheur. « Je suis restée quelques années avec cet homme, mais il m’a donné confiance, ça a changé ma vie. Je pense que jusqu’à 50 ans, je ne savais pas ce que c’était que l’amour », confie-t-elle. « Même la sexualité. À partir de ce moment-là, j’ai fait l’amour vraiment, comme je ne l’ai pas fait avant. »

Que pense sa fille médecin de 50 ans de ce renouveau ? « Elle est ravie que sa maman se porte aussi bien ». Françoise assume pleinement sa sexualité à son âge: pour elle, il n’est « absolument pas » question de renoncer à l’amour ou à la sexualité.

Face aux réactions de son entourage qui pourraient lui dire de « se calmer » à son âge, sa réponse est sans appel: « me calmer, ce n’est pas mon truc. Moi j’ai envie de vivre. La vie est belle. »

L’épreuve de la maladie et l’engagement durable

Walter, 88 ans, livre le témoignage le plus bouleversant. Marié en 1966 avec Renée dans « la plus pure tradition », il a partagé 55 ans avec une femme qui développera une schizophrénie après la naissance de leur fils.

« Par moments, je me demandais si je ne devenais pas fou », rappelle William, 88 ans.

« On avait des discussions interminables. Ça commençait vers 22h, on parlait toute la nuit, mais on tournait en rond », se souvient-il. Les crises, les hospitalisations et les difficultés liées à l’alcoolisme de sa femme ont marqué leur vie. Walter a traversé des moments où il se demandait s’il n’était pas lui-même « fou ».

Malgré les conseils de proches de se séparer, Walter est resté fidèle: « Je me suis dit: ma femme, je ne l’abandonnerai pas. » Découvrir plus tard le passé traumatique de Renée — enlevée à sa mère à 3 ans et placée en institut — l’a conforté dans son choix: « Maintenant, on a des conséquences de ce début de vie. Je crois que j’ai bien fait d’aller jusqu’au bout. »

Aujourd’hui veuf, Walter entretient une relation d’amitié avec une autre femme: sorties, spectacles, discussions… sans vie commune. « De revivre en couple, non, j’ai pas envie. »

Des outils pour faire durer l’amour

Cette diversité d’expériences montre l’importance de la communication. Jasmine et Samuel ont consulté une thérapeute de couple dès le début de leur relation. « Elle nous a aidés à vraiment parler la même langue, à nous rendre compte qu’on fait partie de la même équipe tout le temps », explique Jasmine.

Françoise, forte de ses expériences, applaudit cette approche: « Moi je trouve ça génial. Chapeau à eux. J’approuve 100%. » Une reconnaissance de l’évolution des mentalités entre les générations.

Walter, lui, regrette de ne pas avoir eu ces outils: « On aurait bien voulu les avoir. C’était très traditional. Tu te maries, tu restes toute la vie, tu ne te remets pas en question. Un point c est tout. »

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